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Star Wars – Episode I : La Menace Fantôme, film de science-fiction de George Lucas. Avec Liam Neeson, Ewan McGregor, Natalie Portman, Jake Lloyd…
La note du Koala : 2,5/5
Ce film est suivi par Star Wars – Episode II : L’Attaque des Clones (G. Lucas, 2002).
Le pitch : Dans une période de troubles politiques, la République fait appel à deux Jedi – Qui-Gon Jinn (L. Neeson) et son Padawan Obi-Wan Kenobi (E. McGregor) – pour entamer des négociations avec la Fédération du Commerce qui mène un blocus sur la paisible planète Naboo dirigée par la Reine Amidala (N. Portman). Mais les discussions ne débuteront jamais et, sous les ordres d’un obscur seigneur noir répondant au nom de Dark Sidious, les dirigeants de la Fédération tentent d’assassiner les deux Jedi. Commence alors une ère de complots où les prémisses d’une guerre se font de plus en plus nombreux et où les Jedi pourraient bien voir ressurgir leurs pires ennemis, les Sith, mais aussi découvrir l’Elu censé amener l’équilibre dans la Force en la personne d’un petit garçon : Anakin Skywalker (J. Lloyd).
La critique : Vingt-deux ans après sa dernière réalisation, seize ans après la sortie du Retour du Jedi, George Lucas est revenu à l’œuvre derrière la caméra pour une nouvelle fois donner vie à sa saga Star Wars. Avec La Menace Fantôme, l’objectif est à la fois simple est à la fois simple et clair : raconter les origines de la première trilogie et, plus précisément celles de Dark Vador. C’est aussi donner corps à un background général pensé dans l’esprit de George Lucas depuis les tous débuts de la saga dans une sorte de bible qui aura servi de ligne directrice pour l’intégralité des films.
La genèse de cet épisode I, on peut la faire remonter sur bien des années, sinon plusieurs décennies si l’on veut voir les choses en grand. C’est en fait lors de l’écriture du scénario de L’Empire Contre-Attaque que tout commence. Comme on en avait parlé dans l’article consacré à l’épisode V, George Lucas entame alors la mise sur pied d’une trame de fond qui va au-delà de la trilogie originale en s’intéressant notamment aux origines de Vador, sur à son passé de Jedi et à sa conversion au côté obscur de la Force. Dès lors, le cinéaste pense à une seconde trilogie qui permettrait de traiter tout ça, d’où l’appellation d’épisode V de L’Empire Contre-Attaque alors qu’en son temps, Un Nouvel Espoir n’était nullement un épisode IV. Du coup, la prélogie est en tête de Lucas dès la fin des années 1970 ! Cela étant, le projet est laissé de côté à l’issue du Retour du Jedi pour deux raisons : le réalisateur/producteur est épuisé et a par ailleurs perdu une partie de ses fonds suite à son coûteux divorce. Il faudra alors attendre les années 1990 et un regain de popularité de Star Wars grâce à des comics pour que George Lucas se mette finalement à l’écriture du scénario de l’épisode I en 1994. Question pré-production, rapidement, le réalisateur s’entoure d’une équipe intégralement renouvelée (hormis le fidèle John Williams pour les compositions musicales) et réunie par son nouveau producteur, Rick McCallum, qui a notamment travaillé sur la série Les Aventures du Jeune Indiana Jones. Cela semble être la promesse d’un renouvellement du regard porté sur la saga et de l’angle d’attaque choisi par George Lucas.

C’est accompagné de Rick McCallum (ici à gauche) que George Lucas portera la Prélogie.
Et l’on ne croirait pas si bien dire ! Avec ce nouveau départ, George Lucas semble bien avoir eu l’envie de prendre cette expression justement, « nouveau départ », au pied de la lettre, quitte à bouleverser l’approche son univers que l’on avait pris l’habitude d’avoir.
Loin de nous alors les grandes thématiques établies par Un Nouvel Espoir et entérinées par ses suites. Ici, Lucas reprend tout et passe d’un univers où le voyage du héros était un pilier fondamental, où l’approche de la Force prenait des allures métaphysiques et ou le fantastique l’emportait parfois (souvent) sur la science-fiction à une version redécouverte de celui-ci, emprunte de politique, d’une science qui l’emporte par instants sur le métaphysique justement et finalement d’une froideur propre à la bureaucratie que le réalisateur chercher à explorer dans ce film. Le tout a finalement ses bons et ses mauvais côtés. Les bons, c’est que cela ramène à l’idée qu’en d’autres temps eurent lieu d’autres mœurs et que si la fameuse République Galactique s’est effondrée pour laisser place à l’Empire, ce n’est pas pour rien. Dès que les héros arrivent sur Coruscant dans ce film, on sent tout le poids d’une société fondée par et pour des bureaucrates arrogants et ambitieux qui mènent doucement mais sûrement la république à sa perte, les prémices d’une crise politique se faisant particulièrement sentir lorsque des dirigeants belliqueux cherchent à faire régner la paix par l’affrontement direct et armé.
Au-delà de simplement vouloir ainsi proposer une introduction assez poussée à ce qui a pu conduire à apogée de l’Empire que l’on a connue dans la première trilogie. Quant aux aspects plus spirituels, on pourra évoquer quelques références au christianisme avec Anakin en Elu et Dark Maul en sort d’ersatz du diable mais ça ne va pas spécialement plus loin.

Le deisgn de Dark Maul est très largement inspiré par les descriptions que la Bible donne du diable.
Alors oui, c’est bien en soi que George Lucas tâche de raccrocher son film à la réalité du monde qui nous entoure. Mais l’on n’est ici qu’au stade des intentions qui doivent se concrétiser de la meilleure des manières. Or, le cinéaste passe plutôt bien à côté de son sujet. En voulant politiser Star Wars, George Lucas a surtout contribué à lui faire perdre de sa superbe. Et en sortant d’un visionnage de La Menace Fantôme, difficile d’avoir des étoiles plein les yeux comme à l’époque de la trilogie originale. On aura bien sûr vu de chouettes choses et des personnages intéressants (au premier rang desquels le sage Qui-Gon Jinn et un jeune et impétueux Obi-Wan Kenobi), mais le tout est malheureusement noyé sous un flot continu d’approximation dans le développement non seulement de l’intrigue générale mais aussi de la façon dont celle-ci prend place dans cette nouvelle vision de l’univers Star Wars. En fait, pour dire les choses simplement : George Lucas nous ennuie avec ses histoires de décrets, de sénat, de motions, etc… Je ne dis pas qu’un aspect politique ne peut pas être prenant dans un film de ce genre mais, ici, à quel moment suis-je censé être captivé, emballé, pris de ce si doux sentiment où je sais qu’il va se passer quelque chose mais sans savoir quoi ni comment ? Au lieu de ça, George Lucas propose des choses très convenues qui peinent alors à souligner les réels enjeux des événements. Et c’est sans doute là le plus gros échec de La Menace Fantôme.

La politique est partout dans cet épisode…
Le plus gros ne signifiant pas le seul, on ne pourra qu’évoquer également les effets spéciaux. Annonciateur de l’apogée des fonds verts à tout-va que la Prélogie nous aura faite subir, La Menace Fantôme est un film dont la mise en image est assez largement gâchée par des incrustations numériques approximatives qui jurent avec une idée générale esthétique pourtant bien foutue sur le papier. Très vite daté techniquement parlant (un peu comme Le Hobbit 3 finalement…), le film souffre clairement de cette overdose de numérique, loin des merveilleux décors classiques et des incroyables costumes de créatures des épisodes originaux de la saga… Il y aura pourtant des choses à garder visuellement et en particulier cette course de pods haletante et vive qui, elle, s’en sortait très bien. Pour l’anecdote, c’est même l’une des rares raisons qui m’a poussé à aller au ciné voir le film dans sa version 3D il y a quelques années (oui, je suis de ceux-là).

Non mais heureusement qu’elle est là cette course !
Il faudra aussi évoquer le ratage complet ou presque (selon les cas) dans l’écriture des personnages, à commencer par ce si jeune Anakin Skywalker, assez insupportable (malheureusement, la épisodes II et III nous donneront raison à ce sujet mais on en reparlera…). Geignard et inconscient, il est à deux doigts d’enchaîner les conneries tout le long du film. Le genre de gamin à qui on explique plus ou moins explicitement qu’il est vraisemblablement très important mais qui va quand même désobéir à un Maître Jedi quand ce dernier lui intime de rester à l’abri pendant une bataille sur Naboo, quitte à aller péter du vaisseau en orbite. Et encore, dans le film il est largement épaulé par R2-D2 mais il faut savoir que le script original prévoyait qu’il fasse tout ça tout seul comme un grand…
Je pourrais aussi vous parler de Jar-Jar Binks mais j’en ai à peine envie. Ce ridicule prétexte à jouets et l’un des pires faire-valoir que j’aie pu voir de ma vie de cinéphile, tous univers confondu. D’une débilité confondante et d’une inutilité constante, Binks n’est rien d’autre qu’une vaine tentative de proposer une nouvelle mascotte autre que droïde comme pouvait l’être Chewbacca en son temps.

La Menace Fantôme n’a reçu qu’un seul Razzie Award et ce fut pour l’interprète de Jar-Jar. CQFD.
Question écriture, on ne peut que parler également de celle du scénario, très inégale et n’arrivant que difficilement à rendre ses péripéties palpitantes, les batailles étant souvent assez peu maîtrisées (la pire étant celle qui oppose les Gungans aux droïdes sur Naboo) et l’équilibre entre scènes d’action et scènes de dialogues étant assez peu tenu, ces dernières étant d’ailleurs très inégales. Autant celles parlant de politique deviennent très aisément barbantes, autant celles liées à la Force ou à l’Elu arrivent à saisir l’attention du fan qui y trouve alors de quoi satisfaire sa curiosité et ses envies. Certains reprocheront au passage l’introduction des midi-chloriens dans le concept de la Force (lesquels priveraient alors cette entité de toute sa teneur métaphysique, les midi-chloriens étant des organismes) mais je préfère me ranger aux côtés de ceux qui estiment que cela n’est pas choquant et même assez astucieux sous certains aspects. Par ailleurs, ça n’empêche pas, à mon sens, tout le caractère surnaturel et spirituel de la Force.

Dans les milieux des fans les plus durs, l’introduction des midi-chloriens dans l’univers Star Wars a parfois provoqué un véritable schisme.
Par ailleurs, je persiste à considérer La Menace Fantôme comme un film ayant un rythme suffisamment soutenu mais malgré tout desservi par le manque d’impact de ses principales étapes. La bataille de Naboo aurait dû être plus prenante, les intrigues politiques plus pêchues également. Au final, seule la course de pods sur Tatooine est réellement prenante, grâce au dynamisme inhérent à ces véhicules mais surtout bienvenu dans un film trop calme. On retiendra aussi bien sûr le combat final opposant Qui-Gon Jinn et Obi-Wan Kenobi à Dark Maul. Si ce dernier est loin de figurer parmi les plus remarquables antagonistes de la saga (bien que l’univers étendu lui ait réservé de très jolies choses), il n’en demeure pas moins que son combat face aux deux Jedi est assez saisissant. Tout le monde n’adhère certes pas à son style (dérivé du wushu, dans lequel excelle son interprète Ray Park) mais j’apprécie néanmoins cette petite touche de nouveauté.

Non mais je vous jure, j’ai vraiment aimé ce duel !
Un mot pour finir sur la distribution de cet épisode 1, lequel voit logiquement arriver tout un tas de nouveaux arrivants dans l’univers Star Wars (merci Captain Obvious). Au premier rang de ces nouveaux visages, on parlera bien évidemment de Liam Neeson en Qui-Gon Jinn et d’Ewan McGregor en Obi-Wan Kenobi. Concernant le premier des deux, je n’ai honnêtement rien à redire, l’acteur nord-irlandais offrant au Maître Jedi une incarnation digne de lui. Digne justement, il l’est dasn bien des aspects et Neeson donne à Qui-Gon Jinn une prestance indéniable sans pour autant oublier ce petit côté mutin venant faire écho au caractère bien trempé du personnage. Quant à McGregor, il est très appréciable de le retrouver ici dans la peau du jeune Kenobi, encore inexpérimenté. Un aspect que le comédien souligne en quelque sorte par la teneur de son jeu, lequel s’influence joliment de ce qu’Alec Guinness a fait au personnage avant lui, mais sans aller pour le moment dans un véritable mimétisme, rappelant que celui qui n’est alors qu’un Padawan n’est pas encore le Jedi que l’on a découvert dans Un Nouvel Espoir. On en reparlera.

Les deux seules valeurs vraiment sûres de La Menace Fantôme, elles sont là.
Je n’évoque pas encore le cas de Natalie Portman, sur laquelle je réserve mon avis pour l’épisode II, ni ceux de Samuel L. Jackson et Ian McDiarmind, dont je parlerai plus amplement dans l’article consacré à La Revanche des Sith. Un mot rapide tout de même pour terminer sur Jake Lloyd, interprète d’Anakin Skywalker enfant dans cet épisode. Inexpérimenté, le tout jeune acteur tente d’apporter ce qu’il faut à son personnage mais c’est plutôt en vain. Surjouant parfois, caricatural à quelques instants, il peine – je trouve – à réellement trouver son rythme et surtout son personnage. Le garçon est au moins aussi perdu dans sa façon d’appréhender Anakin Skywalker que ce dernier l’est face aux événements qu’il doit affronter. Alors oui, il y a bien deux ou trois moments où ça passe. Mais c’est tout.

Mouais…
On ne va pas se mentir, le retour de Star Wars en 1999 fut compliqué, pour ne pas dire brutal. Renouvelant totalement son univers, La Menace Fantôme le chamboule sans doute même trop. Rares sont les bonnes idées dans ce film qui en contient quand même quelques unes mais qui souffre quand d’un bien trop grand déséquilibre pour prétendre les porter sereinement. Cet épisode I pourrait presque être qualifié d’échec tant il ose dans des directions aussi inattendues que, pour certaines, peu judicieuses. George Lucas a clairement remis la main sur son bébé à l’aube du XXème siècle et il compte bien le modeler à sa façon. Les épisodes II et III confirmeront tout cela mais on en reparlera…
Le « Oh, au fait ! » :
A l’occasion de la sortie du film, évidemment très attendu, ce sont près de 2 millions de travailleurs américains qui ne sont pas allés travaillés le jour J (d’après un cabinet d’expertise), entraînant approximativement près de 300 millions de dollars de pertes dans l’économie du pays.
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Un article passionnant comme à l’accoutumée. J’aime beaucoup l’éclairage que tu apportes sur le film (je n’avais, par exemple, pas retenu qu’Un Nouvel Espoir n’était pas l’épisode 4 à la base) et le petit « Oh, au fait! » final est bienvenu!
En revanche, une question me vient. Tu écris cet article comme si tu avais déjà ressenti ça à l’époque de la sortie du film. Pour ma part, si je suis bien plus critique désormais, quand il est sorti, j’avais 12 ans et j’étais absolument comme un dingue (je l’ai vu au moins deux fois au cinéma, de mémoire).
Bon, en fait, c’était pas vraiment une question.
Oh ça va.
Vivement ton article sur le 2, c’est celui qui, je pense, va m’intéresser au plus haut point.
Ouh mon Hibou ! ❤
Ah ça te donne cette impression ? Mais évidemment, à 9 ans, je n'avais pas du tout cette réflexion sur le film. Pour moi c'était juste un nouveau Star Wars et c'était forcément bien.
Non non ici j'essaie seulement de donner un avis actuel sur le film et sur la saga. 🙂
L'article sur le 2, c'est pour dans deux semaines ! 🙂
Ce duel final oh j’en ai encore des frissons !
Pour le cast tu n’as pas parlé de Keira Knightley qui tient parfaitement son personnage dans cet épisode.
Et moi aussi je suis allé le voir en 3D à l’époque ! ^^
Ah oui tiens, j’ai oublié Keira Knightley ! Mais tu as bien résumé ce que j’en aurais dit donc ça va.
Heureusement que tu es là hein !
Brofist pour le visionnage 3D !
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