« Solo – A Star Wars Story », Ron Howard, 2018

Solo – A Star Wars Story, film de science-fiction de Ron Howard. Avec Alden Ehrenreich, Woody Harrelson, Emilia Clarke, Donald Glover…

Ce film est un spin-off de la saga Star Wars qui se situe entre Star Wars – Episode III : La Revanche des Sith et Star Wars – Episode IV : Un Nouvel Espoir.
Il se déroule également avant le spin-off Rogue One – A Star Wars Story.

Le pitch : Alors que la galaxie a sombré dans l’ère impériale, la criminalité est de plus en plus forte. Sur Corellia, le jeune Han Solo (A. Ehrenreich) travaille avec son amour de jeunesse Q’ira (E. Clarke) pour le compte de Lady Proxima. Mais quand une opportunité de s’échapper se présente, seul Solo parvient à s’enfuir. Le jeune homme s’engage alors dans l’armée impériale pour devenir pilote tout en faisant la promesse d’un jour revenir chercher son aimée sur cette planète putride. Le début du parcours du plus célèbre contrebandier de la galaxie.

La critique : On avait demandé un film sur Obi-Wan Kenobi, on a eu Rogue One et Solo. Quant à Obi-Wan, son spin-off commence à peine à réellement se profiler à l’horizon d’un univers Star Wars ou le film sur Boba Fett a déjà été clairement confirmé de son côté, celui sur Lando Calrissian sérieusement envisagé, et les deux suites (au moins) de Solo signées… Enfin bref, le fameux contrebandier charmeur jouit aujourd’hui de son film à lui, s’attachant à retracer ses origines, connues jusqu’ici uniquement à travers un univers étendu largement littéraire que Disney a totalement effacé au moment de son rachat de Lucasfilm.

Stratégie de toute évidence logique pour un studio qui souhaite faire table rase du passé pour mieux modeler l’avenir d’une licence à son image. Un studio qui, en plus de cela, ne compte pas se laisser embêter par de quelconques cinéastes qui souhaitent s’approprier tel personnage ou telle histoire plus encore que la firme aux grandes oreilles, d’où l’éviction de Colin Trevorrow sur le futur Episode IX ainsi que celle de Phil Lord et Chris Miller pour ce qui nous intéresse ici. En désaccord avec le scénariste Lawrence Kasdan quant à la teneur à donner au personnage de Han et à sa personnalité, les deux hommes à qui l’on doit notamment La Grande Aventure Lego ont été mis à la porte et remplacés par Ron Howard, auteur de très bons films (Apollo 13, Rush…) et de quelques trucs bien moins enthousiasmants (Da Vinci Code et ses suites, Cocoon, La Rançon…).

Je me suis surpris à suivre ce film avec une sorte de plaisir enfantin.

Putôt chaotique, comme pour tout bon blockbuster du XXIème siècle qui se respecte, le développement de Solo aura donc mené à ce film que nous découvrons aujourd’hui et qui, disons-le d’emblée, n’est certainement pas un grand Star Wars mais reste globalement un bon divertissement. Ce n’est pas un grand Star Wars tout simplement parce qu’au regard de la licence dans son ensemble, spin-offs inclus, Solo ne se démarque réellement en rien tout en évitant cependant de marquer les esprits de la mauvaise manière comme auront pu le faire par le passé La Menace Fantôme ou, plus encore, L’Attaque des Clones. Ni très bon, ni très mauvais, le premier film consacré au contrebandier se contente en fait de se laisser porter par un scénario certes cousu de fil blanc mais néanmoins suffisamment bien construit pour qu’on prenne plaisir à le suivre. Et sans le mettre à égalité avec des standards du genre, je crois que j’ai tout bonnement trouvé ici un film qui m’a fait ressentir la même chose que certains de ces films d’aventure grand public (et le plus souvent pour les jeunes) tels qu’on les faisait dans les 80’s. Et si Solo ne marquera sans doute pas les mémoires de la même manière que Les Goonies par exemple, éternel exemple du genre, il saura néanmoins satisfaire le temps du visionnage. Quitte à l’oublier dans les jours, semaines ou mois qui suivent, peut-être…

Reste que l’histoire qui nous est racontée ici n’a absolument rien d’exceptionnel en soi. Cette nouvelle Star Wars Story repose en effet sur un récit somme toute très classique où un personnage issu des tréfonds d’un bon gros bourbier finit par s’en extirper pour embrasser une destinée hors normes. C’est ainsi que le vaurien de rue Han devient progressivement le contrebandier antihéros Solo que l’on connaît. Enfin pas totalement puisque ce film n’est que le premier d’une trilogie, Alden Ehrenreich ayant en effet confirmé avoir signé pour pas moins de trois films (Ron Howard se projette quant à lui plus loin mais le box office plutôt décevant risque de réfréner les ardeurs). Et cette volonté de raconter une histoire en plusieurs chapitres, même si on n’en sait rien en rentrant dans la salle, on ne peut que la sentir à mesure que le récit avance. Solo laisse en effet dans son scénario (signé Jon et Lawrence Kasdan) un certain nombre de trous plus ou moins conséquents mais toujours opportuns pour apporter de nouveaux éléments d’intrigue à l’avenir, non seulement dans ce qui pourrait bien devenir la trilogie Solo mais également dans un (très) probable film consacré à Lando Calrissian.

Sommes-nous voués à retrouver Enfys Nest dans d’autres films ?

Des interstices à combler donc et qui laissent ici le scénario tâcher de tenir sur ses deux jambes malgré tout. Pour cela, il se contentera de narrer une assez classique épopée à tendance western reposant sur des mécaniques attendues et par conséquent prévisibles qui auraient été une réelle faiblesse si le tout n’avait pas été servi avec une solide volonté de divertir avant tout. Car encore une fois, Solo se veut être un bon divertissement, mission qu’il remplit globalement bien, notamment à grand renfort d’un humour bien plus à propos que celui distillé dans Les Derniers Jedi mais qui révèle encore une fois que ce nouveau pan d’exploitation de la franchise s’adresse avant toute chose à un nouveau public à conquérir, plus jeune, et pour lequel les gags vont être principalement destinés. L’humour paraîtra donc aux plus vieux de la vieille d’entre nous assez enfantin, nous poussant au mieux à ricaner bêtement (même si l’on pouffera gentiment plus qu’autre chose la plupart du temps). Les enfants et jeunes adolescents en revanche, sans doute moins rigides que nous dans leur vision (récente) de ce qu’est Star Wars, y trouveront certainement leur compte et nul doute qu’ils riront de bon cœur.

Pas indispensable mais tout de même appréciable, ce Solo se laisse regarder.

Du coup, l’air de rien, Solo reste un petit plaisir pour le spectateur, fan ou non. On se prend au jeu de suivre ce personnage qu’on connaît bien et qu’on redécouvre au final dans ce qui aurait pu être une grossière erreur. Et si cette itération rajeunie de Han Solo n’arrivera sans doute pas à égaler l’aura de celui qu’il était dans la trilogie originale, on ne pourra qu’être rassurés par ce que l’on a vu. Pas aussi fringant, ni aussi charismatique, ce Solo-ci ne manque cependant pas d’une certaine présence, d’une personnalité qui ne demande sans doute qu’à se renforcer mais qui part d’ores et déjà sur d’assez bonnes bases. Dommage cependant que la mise en scène ne lui rende pas plus hommage que cela. Ce que je veux dire par là c’est qu’aussi principal qu’il puisse être comme personnage de ce film éponyme, Han Solo manque ici de l’attention qu’on prête généralement aux légendes et notamment à celles en devenir. Le jeune contrebandier devra alors se contenter du traitement que l’on réserve à presque n’importe quel héros de film d’aventures lambda. Et cela m’amène d’ailleurs à ce que je voulais évoquer : aussi bonnes soient ses intentions, Solo n’est qu’un film d’aventures lambda. Ça ne l’empêche évidemment pas de s’en sortir relativement bien mais il lui manque du coup une large de part de personnalité, ce qui était le risque en embauchant un type comme Ron Howard, lequel est quand même connu comme étant un réalisateur qui peut facilement livrer des films plutôt fades en matière de mise en scène.

 

L’attaque du train, grand classique du western américain.

Hélas, Ron Howard loupe ici le coche de réaliser un film qui prétende à une vraie personnalité, quelque chose de fort qui le démarque du reste de la licence. Car si je n’attends pas forcément des spin-offs qu’ils réinventent Star Wars, j’ose quand même espérer d’eux une approche qui se distingue du canon de la franchise, dont ils se détacheraient non seulement dans le récit mais aussi dans la mise en scène. Rogue One, en 2016, tâchait déjà d’aller dans ce sens avec une œuvre qui empruntait bien plus aux codes des films de guerre qu’au space opera belliqueux qu’est en général un épisode de Star Wars. Avec Solo, je m’attendais du coup à une sorte de western spatial imprégné des influences que peuvent être John Ford ou, plus particulièrement, Sergio Leone. Le travail du cinéaste italien était d’ailleurs dans l’ombre d’Un Nouvel Espoir en 1977 lors de cette fameuse scène de la cantina sur Tatooine où Luke et Obi-Wan rencontrent Han et Chewbacca pour la première fois dans une séquence qui fleurait bon le western spaghetti que j’affectionne tant. Et, sur le papier, ce Solo se proposait de tout mettre en place pour créer ce western spatial que j’espérais. Tout y est : les bandes de renégats aux allures de cow-boys, l’attaque du train, les cavalcades, le duel dans le désert avec le Soleil dans les yeux…

Tout est là ! Mais Ron Howard n’en fait rien. Et si l’attaque du train en question reste un moment d’action plutôt agréable à regarder, sans doute un des meilleurs instants de mise en scène de tout le film même, ce spin off se contente (et son réalisateur avec) d’offrir un « simple » spectacle d’aventures spatiales avec, par-ci par-là, quelques clins d’œil au genre western, plus qu’une véritable appropriation de ses codes. Inutile alors d’espérer plus de la bande originale, composée par un John Powell qui ne donne que l’impression de rassembler des bribes des grands thèmes de la licence pour les mêler dans ce Solo. Quand on voit la partition de Michael Giacchino sur Rogue One, c’était déjà une autre classe. Dommage donc qu’aussi divertissant qu’il puisse être (car il l’est), ce film semble ne vouloir que s’appuyer sur le seul crédit accordé de base à son héros, sans chercher à offrir quelque chose qui aille plus loin. Quand on a un personnage avec une aura et des influences pareilles, on s’en sert bon sang !

Cool mais si insuffisant…

Mais on ne va pas se mentir, ce qui inquiétait le plus, c’était le sort réservé à Han Solo en tant que personnage, qu’icône même ! Quand tu vois le bordel que c’est autour de la question de savoir s’il a ou non tiré en premier (il l’a fait), tu te doutes qu’on ne plaisante pas avec un protagoniste pareil. Et je dois bien admettre que j’ai été soulagé par ce que j’ai vu. Mais qu’on se comprenne bien : cette itération du personnage n’arrive pas à la cheville de l’incarnation inoubliable qu’en a fait Harrison Ford, c’est impossible.

Il va maintenant falloir confirmer dans les suites !

Néanmoins, Alden Ehrenreich s’en tire honorablement, bien plus qu’on ne l’aurait imaginé. Certes imparfaite, sa prestation n’en est pas moins globalement juste et l’on sent derrière cela les heures passées à décortiquer la trilogie originale pour s’approprier au mieux le style Ford. Un mimétisme qui évite de tomber dans l’imitation sans subtilité et où Ehrenreich fait siennes un certain nombre de mimiques de Harrison Ford (c’en est parfois bluffant, par instants fugaces) sans pour autant reprendre TOUS ces tics de jeu, à commencer par le fameux pointé de doigt qui a fait la renommée de l’interprète original du contrebandier. Un jeu qui se fait donc au service d’un Han plutôt enthousiasmant.

Le reste du cast n’est d’ailleurs pas en reste avec notamment Emilia Clarke et son personnage de Q’ira qui m’intrigue assez. La comédienne connue et reconnue pour sa participation à Game of Thrones évidemment offre une très bonne réponse à l’interprétation d’Ehrenreich et les deux forment au final un combo qui fonctionne relativement bien. Quant à Woody Harrelson, il offre à son Beckett une interprétation classe et mesurée me rappelant notamment ce que John Wayne pouvait parfois donner à l’écran dans ses fameux westerns. Mais c’est en tous cas Donald Glover qui tire le mieux son épingle du jeu tant son incarnation de Lando Calrissian est une bonne surprise. A l’instar de Han, il ne fallait surtout pas se louper sur Lando et ce dernier arrive à être non seulement bien écrit, très fidèle à la trilogie originale, mais en plus excellemment porté par un très bon comédien qui devient sans souci la vraie valeur sûre de cette distribution.

Excellent choix que celui de Donald Glover.

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Solo n’est donc ni un ratage complet, ni un chef-d’œuvre. Il se contente, malheureusement, de distraire et de divertir le temps des 2h15 qu’il dure et d’introduire un nouveau pan de l’univers Star Wars voué à être développé plus en détail dans un certain nombre de suites dont la quantité reste à déterminer au vu du décevant box office auquel ce premier volet fait face. D’aucuns disaient avant que ce film ne sorte que nous étions déjà arrivés à la saturation la plus complète en matière de Star Wars et que tout ceci ne pouvait désormais plus conduire qu’à des œuvres médiocres. J’ai moi-même pensé cela pour tout dire. Mais le fait est que nous n’en sommes pas encore à ce point. En fait, la licence en est aux balbutiements de ce qu’est une franchise annualisée et, comme toutes les autres avant elle, elle n’a pas encore franchi ce point de non-retour où la sortie systématique et en dépit du bon sens de nouveaux épisodes vient primer sur le moindre soupçon de qualité. Ce Solo pourrait sans doute en attester, lui qui s’en sort bien mieux qu’on ne l’aurait cru et qui laisse entrevoir, pour le moment, une licence sans doute vouée à être inégale mais pas encore totalement sur le déclin. On surveillera cependant avec la plus grande attention l’audace dont feront preuve ou non les prochains spin-offs, en particulier en termes de mise en scène. 

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