« Halo Infinite » : Le grand saut ?

Qu’il aura été long d’attendre Halo Infinite ! Annoncé au cours de l’E3 2018, le jeu aura connu un développement compliqué, récemment mis en lumière par le site américain Bloomberg, pour finalement sortir à la fin de l’année 2021. Six ans après les dernières aventures du Major John-117, Infinite débarque avec la ferme intention d’effacer les craintes que les joueurs et joueuses ont pu formuler au cours des dernières années.

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Si Halo Infinite marque cette reconquête du public comme une de ses principales missions, c’est surtout en raison des difficultés que le titre aura eu à séduire durant les moins précédent son lancement. Quiconque s’intéresse de près ou de loin à la licence se rappelle forcément cette vidéo de Juillet 2020 au cours de laquelle 343 Industries et Xbox souhaitaient en mettre plein la vue à tout le monde, tout en présentant les principales nouveautés de gameplay de cette sixième itération de la franchise (du moins si l’on ne compte que les épisodes principaux). Alors oui, on aura vu pas mal de choses au cours de cette présentation – attendue – mais rien de tout cela n’aura pesé face aux errances techniques du jeu qui jaillissaient de chaque instant de la vidéo. Les graphismes disgracieux, entre autres soucis, furent la goutte de frustration qui fit déborder le vase de la patience des fans de la licence. Même pour quelqu’un comme moi, qui ne fais pas partie de ceux qui ne jurent que par la « perf », il fallait bien reconnaître que le titre avait alors de quoi poser question quant à l’état de son développement. Dans leur article du 8 Décembre dernier, Dina Bass et Jason Schreier détaillent pour Bloomberg « l’après » de cet épisode bien malheureux en termes de communication, qui interrogeait d’ailleurs une fois de plus sur les exigences formulées en interne pour livrer un jeu à une date donnée en dépit des difficultés rencontrées par son développement. Dans ce reportage, nous retrouvons d’ailleurs cette déclaration de Phil Spencer (patron de Xbox) qui estime que ses équipes et lui auraient dû être honnêtes avec eux-mêmes avant de lancer cette vidéo en ligne. L’on découvre aussi que c’est dans un mouvement digne des meilleurs débâcles à juguler que l’on est allé chercher les renforts nécessaires. C’est de cette manière que Joseph Staten, principal scénariste des trois premiers jeux, a été appelé à la rescousse en tant que directeur créatif alors qu’il ne bossait plus du tout sur la série. Staten a alors joué au « coach« , nous rappelle Bloomberg :

« Une des premières choses qu’il fit aura été de rappeler aux équipes démoralisées du studio que le succès sur le long terme de la franchise a été marqué par plusieurs introductions cahoteuses, dont une démonstration désastreuse du tout premier Halo en 2001 qui a failli condamner la série avant même qu’elle ne commence. »

(Bass & Schreier pour Bloomberg, 08/12/2021)

Je ne vais évidemment pas vous refaire tout l’article sur ces pages, là n’est pas mon sujet. Je vous invite cependant à vous y intéresser (cf. lien quelques lignes plus haut) car au-delà de narrer les écueils qu’un jeu de ce standing a pu rencontrer, il raconte avec une certaine proximité les coulisses du jeu vidéo en tant que secteur professionnel, avec encore et toujours toutes ces problématiques dont il peine à se défaire. De mon côté, si je vous évoque tout ceci en ouverture de mon propre article, c’est surtout pour vous contextualiser les choses et vous rappeler que, finalement, Halo Infinite n’était pas attendu QUE parce qu’il était le nouvel opus d’une célèbre franchise de jeux de tir. Il l’était parce qu’il a fait des promesses dès le départ et qu’en cours de route, il est apparu sans faire semblant comme incapable de toutes les tenir.

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Cet ennemi présent dans la vidéo et rapidement rebaptisé Craig par internet aura cristallisé tout ce qui n’allait pas. Même Xbox en aura fait des mèmes à quelques encablures de la sortie du jeu.

La fameuse vidéo de cet été 2020, si l’on essayait de faire abstraction de ce qui n’allait pas, dévoilait pourtant des choses intéressantes. Tout en affirmant l’intention d’ouvrir le level design de Halo, elle donnait à voir quelques nouveautés qui, à mon sens, paraissaient prometteuses malgré un côté très « années 2010 ». Entre un monde qui commence à s’ouvrir et un grappin qui rejoint l’arsenal du major, c’était presque à se demander si les gens derrière Halo n’ont pas un ou deux trains de retard sur la concurrence. Du reste, il serait bête de simplement se cantonner à cet a priori et force est d’admettre que ces deux éléments étaient alléchants dès le départ. Le premier laissait envisager une nouvelle façon d’envisager les assauts, un peu à la manière d’un Metal Gear Solid V – The Phantom Pain (en plus frontal bien sûr, l’infiltration n’étant pas le credo de John-117). Quant au grappin, son utilisation telle que présentée en vidéo faisait plutôt saliver d’avance : il donnait le sentiment d’offrir un dynamisme revu à la hausse dans les affrontements ainsi qu’une nouvelle appréhension du level design – plus en verticalité – et donc de nouvelles manières d’attaquer, de nouvelles stratégies de combat à mettre en place.

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Le grappin alimentait la promesse d’un gameplay plus vif dès le départ.

Il faut dire aussi que jusque là et en dépit des qualités qui sont les siennes, la saga Halo n’a jamais spécialement brillé par une inventivité outre mesure. Si elle demeure un fer de lance du genre FPS sur consoles et si ses tenants et aboutissants de base en matière de game design en général et de gameplay plus spécifiquement se sont de tous temps révélés assez solides, il serait assez vain d’essayer de convaincre qui que ce soit que les idées implémentées dans cette série sont proprement révolutionnaires. En atteste d’ailleurs ce fait que les deux principales nouveautés de ce dernier épisode en date sont des éléments que l’on retrouve dans les jeux vidéo de tous types ou presque depuis une grosses dizaine d’années, voire plus pour les plus anciens. Ceci étant dit, voilà qui nous amène à un point intéressant, à savoir celui où l’on va devoir choisir la manière dont nous allons appréhender ces propositions. Allons-nous être de ceux qui ne vont y voir que des features trop anciennes au regard de l’histoire du jeu vidéo pour être sincèrement intéressantes ? Ou bien allons-nous être de ces autres qui vont essayer de resituer ces intentions inédites non au regard du média dans son ensemble mais plutôt dans le contexte bien plus précis et donc plus restreint de la seule saga qui nous concerne ici ? Peut-être même choisira-t-on de prendre un peu des deux partis… Une seule façon de savoir quoi en penser de toute façon : expérimenter la chose in game.

Or, s’il y a bien un constat que l’on fera rapidement concernant le grappin une fois qu’il nous est mis entre les mains, c’est qu’il constitue effectivement un apport indéniable au système de jeu classique de Halo. Ces impressions de dynamisme qui ressortaient de la vidéo de présentation évoquée plus haut, elles sont bien réelles et l’usage de ce nouvel équipement booste considérablement la vivacité des combats. Si l’accent fut mis en amont de la sortie du jeu sur la verticalité renouvelée que cela pouvait apporter au titre, je trouve cependant que c’est dans un autre secteur que le plein potentiel du grappin se ressent, à savoir celui de l’esquive. Capable de se cramponner à n’importe quel élément du décor, l’outil sera en effet particulièrement convaincant dans la manière qu’il aura de permettre des évitements plus rapides et plus précis qu’ils n’ont pu l’être dans les Halo précédents. Bien entendu, il sera également beaucoup utilisé pour amener à soi divers objets explosifs à lancer sur ses adversaires ou des armes tombées au sol. En cela, le grappin permet de répondre avec rapidité à une éventuelle absence de munitions dans les cas où elles viendraient malheureusement à manquer (ce qui vous arrivera).
Mais ce qui se ressent le plus dans l’usage du grappin, c’est cette espèce d’intuitivité qui confine presque à l’instinct, au réflexe quasi-naturel de presser ce seul bouton pour dégager vite fait, se projeter sur un ennemi et lui asséner un coup ou encore se lancer dans les airs et arroser un groupe d’aliens peu recommandables. C’est là que cette idée, si peu novatrice soit-elle en soi, le devient d’un coup par la force des choses, dans cette aptitude à reprendre le gameplay de Halo dans ce qu’il a de plus basique et lui ajouter ce supplément qui lui manquait sans qu’on sache trop l’identifier jusque là. Ce grappin, c’est ce truc qui nous faisait défaut sans qu’on sache pourquoi. Une fois employé dans Infinite, la réponse est donnée : Halo était un FPS trop statique, trop rigide. A tel point que des passages bien précis des épisodes précédents étaient parfois plus simples à parcourir en évitant le conflit plutôt qu’en le provoquant. Ici, la question ne se pose plus car le sacro-saint grappin change la donne. Même cerné par des hordes adverses et dans des situations où la vie du Major ne tient plus qu’à un fil, il arrivera aussi à devenir cette issue de secours salvatrice qui permettra de se sortir du pétrin. De la même manière, le grappin et la possibilité qu’il offre d’atteindre divers points en hauteur forment une ouverture plus agréable qu’à l’accoutumée pour la recherche de perchoirs depuis lesquels on se plaira à « nettoyer » une zone avec un sniper. Là encore, c’est aussi cette ouverture du level design qui s’exprime en quelque sorte mais nous y reviendrons.

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Le grappin sera aussi un outil indispensable pour arpenter les différents reliefs du Halo.

En attendant, reconnaissons que malgré l’enthousiasme ressenti en s’agrippant de tous côtés, la médaille a son revers et il faut bien admettre que si cet accessoire présente bien des qualités et offre même un certain plaisir dans son utilisation, il est aussi la cause d’un rééquilibrage des affrontements qui ne va pas nécessairement dans le sens d’un challenge qu’on aurait pu espérer plus soutenu. En donnant aux joueurs et joueuses la possibilité de s’extraire ainsi des situations les plus délicates, Halo Infinite minimise un petit peu sa difficulté. Bien entendu, libre à chacun(e) de réhausser cette dernière dans ses propres réglages, le titre proposant en effet quatre niveaux de difficulté distincts. Mais je constate malgré tout cette relative simplification des choses à travers le seul fait qu’à difficulté égale, je suis bien moins mort dans Infinite que dans ses prédécesseurs. Adjoint au fait que l’armure et la santé du Major se régénèrent d’elles-mêmes (comme cela a toujours été le cas), le grappin est donc aussi une porte ouverte vers un degré de défi quelque peu amoindri. En résulte alors des assauts trop facilement remportés ou bien des affrontements à rallonge, faits d’esquives à répétition jusqu’à trouver le meilleur emplacement de tir avant de s’en faire déloger et ainsi de suite… Le résultat sera en définitive toujours le même : une victoire, certes, mais parfois à moindre prix.

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Le tableau de compétences permettra d’assez rapidement améliorer les différents accessoires du Major : grappin, armure, radar, bouclier, esquive.

Cette impression – et ce n’est sans doute pas qu’une impression – de simplification se trouve par ailleurs renforcée par la table d’améliorations mise à disposition pour agrémenter le Major d’accessoires très régulièrement boostés. Moins dense qu’un véritable arbre de compétences, cette table n’en révélera pas moins son aptitude à toujours plus alléger le challenge en confiant aux joueurs et joueuses des upgrades sans cesse plus utiles pour prendre le moins de coups possible. Entre ce même grappin qui finit par pouvoir étourdir les ennemis, les boucliers sans cesse plus résistants ou encore les petits propulseurs qui accélèrent encore un peu les esquives latérales… Disons que les amoureux de tactiques défensives s’y retrouveront certainement mais n’est-ce pas là encore au détriment non seulement de la difficulté attendue d’un nouvel Halo mais aussi de la patte propre à cette série qui n’a jamais lésiné sur un aspect assez bourrin que le Major incarne si bien ? On ne saurait cependant être si catégorique et « accusateur » devant cet état de fait tant l’utilisation de ces éléments est agréable une fois la manette dans les mains. Et si les habitudes se trouvent peut-être un peu bousculées finalement, doit-on pour autant nier le plaisir ressenti face à tout ce dynamisme que j’évoquais plus haut et qui se retrouve encore enrichi par cet attirail renouvelé et revu ? Dans ce grand saut que semble vouloir faire Halo Infinite vis-à-vis de la saga, voilà certainement un premier pas de fait pour prendre son élan.

Quand vient le moment d’enchaîner avec un autre pas pour bondir enfin, c’est à un autre aspect que nous pensons, celui du level design général de ce jeu. Une fois de plus, c’était là une promesse formulée assez tôt dans la communication autour d’InfiniteHalo devait passer à l’open world. Ou disons plutôt que Halo devait ouvrir son aire de jeu, voilà qui est un peu plus vrai. Car finalement la promesse n’a jamais été d’envoyer le Major combattre les Parias – ses ennemis du jour – dans un monde ouvert tel qu’on en trouve dans la plupart des productions AAA de ces dernières années, de Red Dead Redemption II à Death Stranding en passant par Breath of the Wild. Evacuons donc tout de suite l’idée qu’on aurait pu avoir en s’imaginant déjà arpenter l’intégralité du Halo Zeta en une boucle complète. Non, là n’est vraiment pas la question et cela, le jeu nous le rappellera judicieusement assez vite en nous faisant ouvrir la carte.
Le monde de Halo Infinite apparaît alors bien plus ramassé que cela, condensé sur une infime partie du titanesque anneau spatial en une sorte de bac à sable XL. Les fanatiques du blockbuster vidéoludique avec des mondes ouverts aux limites sans cesse repoussées ne s’y retrouveront peut-être pas mais il me semble bien plus pertinent de cantonner Halo dans une zone de jeu à sa juste mesure. Peut-être parce que c’est un shooter avant d’être un jeu d’aventure par exemple, je n’ai pas le sentiment qu’Infinite avait besoin d’un espace d’expression trop grand. Pour en faire quoi de toute façon ? Les jeux de tirs reposant pour l’essentiel sur un contact quasi permanent avec l’ennemi, quel aurait été l’intérêt d’étirer à outrance la zone de jeu ? Ici, 343 Industries se « contente » donc de concentrer le contenu de son jeu sur un espace certes grand malgré tout, ouvert, mais néanmoins propice à condenser les choses pour éviter un éparpillement vain ou une répétitivité lassante.

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Plus réduite que dans un jeu à monde ouvert « standard », la carte de Halo Infinite se construit autour de bases avancées qui permettront de découvrir les différentes tâches à accomplir sur le terrain. Classique.

Au regard des activités proposées in game, cette idée de redondance saute d’ailleurs rapidement aux yeux comme un risque auquel Infinite se frotte presque constamment. Pour faire simple, le titre s’oriente autour d’une poignée de choses à faire : missions principales bien sûr mais aussi bases avancées à reconquérir, cibles prioritaires et sabotage. A côté de cela, on rajoutera enfin les ponctuelles tours de propagande à détruire ainsi que quelques collectables dont des cosmétiques pour le multijoueur et des points de compétences à glaner pour alimenter le tableau d’améliorations dont je parlais juste avant. Présenté comme cela, on pourrait avoir l’impression d’un contenu rachitique, sinon feignant. Il faut bien se rendre à l’évidence : tout ceci ne fait que correspondre à un cahier des charges excessivement classique, très Ubisoft dans l’âme, et finalement un peu banal. A défaut de mécaniques ingénieuses et d’objectifs qui tentent de renouveler un peu le statu quo des mondes ouverts, Halo Infinite se limite à des choses déjà vues trop de fois pour être pleinement satisfaisantes. Tant et si bien qu’au bout d’un moment on se surprend (à peine) à ne ramasser les collectables que parce qu’ils sont sur notre chemin tandis que nous avançons vers quelque chose de plus intéressant à faire. On fera aussi une, deux puis trois cibles prioritaires avant de se rendre compte que c’est un peu répétitif ça aussi, en dépit de la bonne dose de défi qu’elles peuvent représenter. Restent alors les missions de la campagne scénarisée (heureusement) et les assauts à mener sur des bases à reprendre, sur des hauts lieux ennemis à faire tomber ou sur des troupes qui retiennent des camarades prisonniers. Notons que ces derniers sont d’ailleurs assez utiles en soi étant donné que chaque soldat retenu captif rejoindra notre escouade une fois qu’il aura été libéré, ce qui ne sera pas toujours de trop.
Au contraire, il sera bienvenu de récupérer quelques compagnons d’armes malgré tout parce qu’on aura beau trouver que le challenge est parfois trop minimisé par les features intégrées dans ce jeu, il serait quand même assez faux de croire que Halo Infinite est un jeu proprement facile. Au contraire, si la difficulté générale du titre me semble plus faible que celle de ses prédécesseurs, Infinite offre tout de même quelques bastions corsés et desquels il sera parfois plus compliqué de venir à bout. Cela pourrait être vu comme le signe d’un déséquilibre dans la gestion de la difficulté au sein du titre – et je veux bien souscrire à cette vision des choses, sans en faire un scandale – mais je préfère m’attarder sur le sentiment grisant que ces séquences représentent à leur tour. Au sein d’arènes relativement chargées tant en ennemis qu’en obstacles et locaux où pénétrer, nous nous retrouvons pris dans des batailles parfois dantesques où c’est tout le potentiel des nouveautés de ce soft qui s’exprime, en plus de ses performances techniques.
En effet, Infinite donne lieu à des escarmouches prenantes, sans véritables respirations et où chaque recoin sera un guêpier éventuel. Le nombre d’adversaires et leur agressivité n’enlèvera rien à ce sentiment, bien au contraire. Avec généralement deux phases dans ces assauts, les joueurs et joueuses n’auront pas le temps de souffler quand, au moment de croire que la zone est nettoyée, des renforts tombent (littéralement) du ciel et nous mettent face à des ennemis parfois encore plus coriaces. A bien y regarder, cela correspond à une construction assez classique des choses (deux phases de jeu, la seconde plus dure que la première, et l’obtention d’une récompense à la fin) mais le dynamisme dont tout ceci jouit permet de prendre son pied. L’on n’est cependant pas encore au niveau d’adrénaline d’un DOOM (je pense ici particulièrement à celui de 2016 et à sa suite, DOOM Eternal), même si cet Infinite montre les signes d’une envie de s’en rapprocher assez fréquemment au cours de l’aventure. Je reste intimement convaincu que les équipes de 343 Industries devraient essayer à l’avenir de s’inspirer davantage de la licence démoniaque, de sa gestion du rythme dans les affrontements et de ses propositions en matière d’ajustement de la difficulté selon l’avancement des combats. Je me plais d’ailleurs à croire que le rachat de Bethesda (qui détient la licence DOOM) par Xbox (qui détient donc Halo) pourrait dans les prochains temps permettre un partage d’expérience bienvenu entre les deux entités. Ce serait une bonne chose, n’en doutons pas.

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Certains passages seront de tels nids à ennemis qu’on sera toujours contents de trouver une tourelle à emmener à avec soi pour faire le ménage.

Ceci étant dit, cette ouverture que l’on ne peut toutefois que noter tant à grande échelle qu’à plus petite, il semble indéniable qu’elle apporte quand même un petit quelque chose en plus à Halo. Autant le dire tout de suite : avec Infinite, je trouve que la série touche enfin aux promesses qu’elle formulait dès le premier épisode, il y a de ça 20 ans et des poussières. Lorsque j’ai découvert Halo: Combat Evolved pour la première fois il y a quelque temps, le titre m’a paru comme réfréné dans ses ambitions par les limitations techniques de l’époque. Sorti sur la toute première Xbox, le jeu alors développé par Bungie donnait à voir un space opera audacieux, bourré de bonnes intentions qui se retrouvaient cependant frustrées par l’impossibilité de mettre en place tous les outils nécessaires à leur accomplissement. On ne parlera évidemment pas de gâchis : il s’agissait d’une première incursion dans l’univers du Major et il semblait trop utopique de tout réussir du premier coup. Mais si les suites de Halo: CE n’ont pas manqué d’apporter chacune leur pierre à l’édifice, je crois sincèrement que c’est avec Infinite que l’on s’approche enfin de l’intention originelle. Plus satisfaisant encore, 343 Industries touche enfin du doigt cet horizon en évitant avec intelligence de trop en faire.
J’y faisais déjà référence plus haut dans cet article mais il me paraît intéressant de voir comment ce jeu-là se rapproche sous plusieurs aspects de MGS V. Les deux partagent en effet une ouverture globalement similaire avec des points d’intérêts que l’on peut appréhender de diverses manières et un « semi monde ouvert » plutôt qu’une grande map aux innombrables km². Pour rappel, MGS V se divisait en effet en deux zones ouvertes distinctes – l’Afghanistan et l’Afrique centrale – dans des dimensions raisonnables qui permettaient au soft de ne jamais perdre de vue son orientation infiltration inhérente. Infinite tente de réaliser le même coup sur sa propre zone de jeu avec ses propres bastions accessibles d’une multitude de manière et que nous pouvons assaillir selon la stratégie de notre choix. La différence principale entre les deux propositions touchera bien entendu aux genres dans lesquelles elles s’inscrivent, ce qui conduira à des résultats évidemment différents, mais je crois qu’elles sont tout de même régies par les mêmes envies. Je me suis ainsi surpris dans mes premières heures de jeu sur Halo Infinite à me trouver un spot d’observation, à jauger ma cible et à définir mon angle d’attaque de la même manière que je le faisais dans The Phantom Pain à l’époque. Je pense que cette possibilité de temporiser l’action, offerte par l’abandon du circuit classique en couloirs et arènes clos, permet de renouveler l’intérêt du game design de Halo, lequel commençait sérieusement à manquer d’ingéniosité dans les derniers titres.

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Les amoureux du bon vieux système « couloirs-arènes » seront néanmoins ravis par les environnements intérieurs, lesquels ne dérogent absolument pas à cette règle.

C’est dans cette ambiance générale d’élargissement des horizons et d’ouverture que l’autre promesse apportée par le grappin est censée prendre tout son sel. Dans cette région marquée par un dénivelé certain et que l’on découvre émaillé de nombreuses bases au sein desquelles pénétrer, le fameux outil dont nous avons parlé plus haut doit nous permettre d’expérimenter une verticalité plus présente dans l’ensemble du jeu. Cela étant, on découvre assez rapidement que ce n’est pas réellement aussi concluant qu’espéré. Je l’évoquais rapidement plus haut en parlant du fait que le grappin est surtout plaisant dans l’esquive qu’il rend plus fluide mais le fait est que cette verticalité a bien des difficultés à vraiment prendre corps dans le cours du jeu. En cause notamment, des arènes qui ne proposent hélas que trop rarement plus de deux étages… Si certaines zones accumuleront les étages dans des bâtiments assez hauts, les salles en elles-mêmes ne proposent finalement que peu de hauteur et l’on ne naviguera qu’entre deux niveaux assez classiquement conçus. Bien entendu, le grappin y fait une fois de plus montre de son intérêt et donne lieu à quelques séquences de jeu plaisantes. En effet, ne nous leurrons pas et reconnaissons au contraire que traverser une pièce dont on est à l’étage en s’accrochant à un ennemi pour mieux lui coller une mandale et enchaîner en saisissant un objet explosif au sol et l’envoyer sur trois autres adversaires, c’est prenant quand on est dedans. Mais on regrette en définitive que l’affaire ne soit pas poussée un peu plus loin. A côté de ces instants virevoltants, la verticalité donne aussi plus envie de jouer les snipers, comme je le disais un peu avant, mais n’ira jamais vraiment cherché l’idée qui lui permettra de marquer un pas de côté vis-à-vis de la concurrence. Efficace donc, mais pas assez ingénieux.

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Infinite est à l’image de ses deux personnages : éprouvé par un parcours cahoteux mais sans jamais céder au pessimisme. On ne peut qu’espérer avec lui des lendemains faits de grandes réussites.

En définitive, c’est tout cela qui fait que Halo Infinite demeure une réussite, certes, mais perfectible. Parce que le jeu a su se donner des objectifs simples, accessibles et raisonnables mais qui soient à-même de donner à la licence une saveur un peu renouvelée (au moins en partie), le dernier-né de 343 Industries satisfait en grande partie. Mais d’un autre côté, il vacille en de nombreuses occasions par son incapacité à transcender le modèle sur lequel il s’est appuyé pour développer cette nouvelle formule. A chaque fois que l’on se surprend à passer un bon moment, à se découvrir des sensations nouvelles auxquelles Halo ne nous avait pas encore totalement habitués, on ne peut s’empêcher de se dire « Ah mais c’est dommage qu’il ne fasse pas ceci ou cela en plus »… Halo Infinite est un jeu nourri d’intentions louables, d’une envie de faire bien, mais il manque de peu le stade où il réalise pleinement la mue attendue, calant toujours un « mais » dans chacune de ses idées. On propose un petit open world mais le level design n’en tire pas assez profit et les environnements intérieurs demeurent archi-classiques, à tel point qu’on mise sur la verticalité mais sur trop peu d’étages. En ouvrant l’aire de jeu, on en profite pour proposer un peu plus de choses à faire qu’à l’accoutumée mais ce sont les mêmes trucs qu’on voit depuis 10 ans. Et ainsi de suite… C’est dommage de seulement effleurer les choses ainsi alors qu’en même temps, le titre arrive à proposer une expérience de jeu qui se révèle sincèrement plaisante sur le long terme dans ce qu’elle de plus essentiel, à savoir les combats. Parce que, malgré tout ça, en dépit des promesses trop difficilement approchées, bon dieu ce que c’était cool d’incarner le Major dans cet épisode ! Ce dynamisme, cette vivacité, cette force brute qui émane de chaque tir et chaque coup qu’on portera dans la peau de John-117, c’est tout ce que Halo avait jusqu’ici essayé de faire ressentir mais sans jamais réellement y arriver. Rien que pour cela, je pense honnêtement que les amateurs tant de la licence que du genre FPS sauront trouver un vrai plaisir à découvrir cet opus, même si nuancé par les approximations. A la fin, on quittera Halo Infinite avec l’impression d’avoir parcouru un jeu qui se démarque de ses prédécesseurs mais qui, au lieu de répondre aux promesses que toute une saga a formulées depuis le début des années 2000, ne fait qu’en ajouter un peu plus à tenir dans les prochains temps. Un mal pour un bien finalement, espérons le.

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Au moment de conclure votre lecture de cet article, vous aurez peut-être remarqué que je n’ai rien dit concernant le scénario de ce Halo Infinite. Il y a une bonne raison à cela : je n’ai rien de particulier à vous raconter à son sujet. Faisant partie de ceux qui trouvent que l’histoire générale que les jeux de cette série raconte n’a jamais été son point fort, je dois bien vous confier que je n’ai suivi le récit de ce jeu-ci que d’un œil distrait mais suffisamment attentif pour noter les efforts d’humanisation du personnage – plus fins que je ne l’aurais cru – et les quelques facilités dont le scénario fait volontiers preuve pour conclure l’arc de Cortana, qui trouve ici un final assez terne. 
Me restera bien plus en tête ce sentiment que je décrivais juste au-dessus, fait d’un mélange de grande satisfaction et de frustration. Infinite a su se sortir des ronces dans lesquels il semblait empêtré il y a quelques mois encore et s’affiche sur nos écrans dans toute sa grandeur. Mais, peut-être est-ce d’ailleurs la conséquence des difficultés que le développement a rencontré, il ne peut que sembler pouvoir faire encore mieux, encore plus solide ! Les promesses sont là et à défaut d’effectuer son grand saut, Halo les emploie comme un tremplin pour enfin réaliser ce bond en avant tant espéré.

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